Initié au début des années 1930, le développement de kits d’urgence pour les pilotes de l’US Air Force avait pour but d’aider les survivants des avions abattus en pleine mission à survivre le temps d’être secourus. Le contenu de ces kits de survie offrait un large éventail de possibilités sur un terrain considéré comme hostile tant à cause de la présence ennemie que de l’environnement.
Entre les rations comportant entre autres du fil de pêche, des munitions, une boussole, du chocolat immonde, de l’équipement médical et même des préservatifs (!), nous allons nous intéresser aujourd’hui au contenu et à l’évolution des différents kits de survie de l’aviation américaine tout au long de la Seconde Guerre Mondiale.
Les kits de survie de série B pour « Bailout » (sauvetage)
A partir de 1936, l’Etat major américain teste le kit de sauvetage de série B. Le B-1 était réservé aux missions en milieu montagneux tandis que le B-2 était réservé aux zones de jungle.
Le kit de survie était notamment composé de rations de combat, d’allumettes dont le bout contenait une boussole, du fil de pêche et d’un hameçon ou encore du bandage et des bandes de gazes.
Les résultats des tests ont permis d’arriver à un Kit de sauvetage standardisé (le B-4) servant à partir d’octobre 1942 pour l’ensemble des pilotes et des climats.
Le Kit de série 4 s’est vu augmenté de gants, d’une machette repliable ainsi que d’une fusée de détresse tenant quelques minutes. Finalement, la dernière version du kit de série B contiendra en sus un manuel de survie en zone hostile et un… poncho.
Les vestes de survie de série C
Début 1943, l’Etat Major cherche à produire des kits de survie à disposer directement à la veste des pilotes. Le kit se voulait plus facile à transporter. C’était surtout beaucoup plus pratique en cas de sortie urgente de l’avion. En effet, comme il était constamment porté, plus besoin de chercher (si on avait le temps) et emporter le kit avec soi.
Les tests de cette première veste de survie furent si concluants que très peu d’ajustements durent être entrepris. Aussi, en décembre 1944, 200 000 vestes de série C-1 furent commandées tandis que 16 000 étaient déjà délivrées aux pilotes.
La veste est reconnaissable à sa couleur vert olive et son insigne coloré de l’AAF (Army Air Forces). Épaisse et résistante, la veste était produite en taille unique. Pour l’ajuster il suffisait de serrer les sangles arrières. En plus d’un étui servant à contenir un pistolet de type M1911, la veste contenait en tout 16 poches. Chacune était destinée à accueillir un objet spécifique.
Avec l’ensemble des équipements, la veste de survie de série C pesait tout de même 5 kilos.
Les Kits de survie de série E officiellement pour « Emergency » (Urgence)
L’Histoire des kits de série E est plus intéressante que celle de simples innovations incrémentales des kits de séries B. Développés en partenariat avec le Service d’Intelligence militaire américain, les Kits comme le E-3A ou le E-17 avaient aussi pour but de servir à la fuite (« Evasion ») des survivants. De tailles réduites, ces kits représentaient l’ultime recours des pilotes abattus au sein d’un territoire tenu par l’ennemi.
Ainsi la boussole était toute petite, ce qui lui permettait d’être avalée par le pilote s’il était fait prisonnier. S’il réussissait à s’évader il pouvait la récupérer dans ses selles et l’utiliser. En outre, le kit contenait notamment un miroir de signalement d’urgence de type ESM/1.
A propos des barres de chocolat dans les kits de sauvetage
Les kits de survie contenaient généralement des barres de chocolat de la marque Hershey au sein des rations de combat.
Pensées pour ne pas fondre dans les environnements chauds (tropicaux), elles avaient aussi intentionnellement un très mauvais goût. Pourquoi ? Tout simplement pour n’avoir d’intérêt qu’en cas d’extrême nécessité. Leur but était donc bien de survivre et non pas de prendre du plaisir. Le problème avec la recette de base est qu’elle était un peu trop efficace : de nombreux soldats refusaient de la manger car le système digestif peinait à la digérer. En outre, il était même difficile de mordre dedans tant la barre était dure. Certains soldats se moquaient d’ailleurs de la barre Hershey en la désignant comme l’une des « armes secrètes d’Hitler » !
En 1943 la recette évolua un peu pour proposer une barre de chocolat moins difficile à manger et digérer ainsi qu’un goût légèrement plus savoureux. En 1945, les usines de Hershey étaient en mesure de produire plus de 24 millions de barres tropicales par semaine.
Des préservatifs dans les kits de survie des pilotes américains ?
Comme on peut le voir dans les kits de survie de série E, une boite de prophylactiques était fournie à chaque pilote.
A quoi pouvaient bien servir des préservatifs à des pilotes devant survivre en terrain hostile ? Vous allez voir que leur présence répond aussi bien à des questions de protection sexuelle qu’à des questions pratiques dans un contexte de survie.
Les préservatifs comme élément à part entière de la communication autour des maladies vénériennes
Une des propagandes quelque peu surprenante de la seconde guerre mondiale concerne la lutte contre les maladies sexuellement transmissibles au sein des armées.
L’Etat major savait qu’il n’était pas en mesure de contrôler les pulsions de ses soldats sur le territoire libéré. Or, le risque d’attraper des maladies telles que la Syphilis ou la Gonorrhée était considéré comme fort. Ces maladies plus ou moins handicapantes physiquement faisait diminuer le nombre de soldats disponibles pour se battre. En outre, la prise en charge médicale nécessitait de l’équipement et du temps qui auraient été bien plus utiles ailleurs (soin des blessés notamment).
Le ton du message était donc menaçant afin de jouer sur les peurs des soldats. On notera d’ailleurs que certaines affiches cherchaient en plus à rappeler que des soldats à l’infirmerie à cause des MST représentaient une chance pour l’ennemi d’être plus fort.
Est-ce que cela a fonctionné ? Les chiffres fournis par les archives du département médical de l’Armée américaine montrent bien que les cas de maladies vénériennes touchaient tout de même près de 45 soldats sur 1000 en moyenne.
Lecture du tableau : Pour chaque maladie le tableau indique le nombre de cas diagnostiqués par un médecin militaire au sein de l’US Army entre 1942 et 1944. Le taux (« rate ») correspond à la moyenne de cas pour 1000 soldats. Le chiffre est donc énorme et ne prend même pas en compte l’année 1945 durant laquelle les soldats américains pénètrent… le territoire allemand.
Selon le site les archives de l’armée américaine ces chiffres sont probablement sous-évalués car ils correspondent au recensement effectué par les médecins de l’Armée. Les soldats diagnostiqués après leur service militaire ou en dehors d’un contrôle médical de l’armée ne sont donc pas comptabilisés. Cela montre bien à quel point le sujet des maladies vénériennes n’était pas délaissé par l’Etat-Major. Pour les plus curieux, sachez que Youtube regorge de vidéos de propagande d’époque de l’Armée américaine à propos des maladies sexuellement transmissibles.
La matière des préservatifs permet une utilisation étonnamment pratique dans un contexte de survie
La présence des préservatifs répond donc à une exigence de protection sexuelle. Cependant, ils peuvent aussi servir dans pleins d’autres occasions lorsque le pilote abattu doit survivre dans un milieu hostile.
Parmi les utilisations possibles des prophylactiques distribués dans les kits de survie on peut lister :
Réaliser les parties élastiques d’une fronde :
Une gourde de fortune ou bien poche imperméable pour des objets sensibles :
Une aide précieuse pour allumer un feu
En cas de blessure :
Enfin, le préservatif peut aussi servir de protection sanitaire en cas de blessure. Si votre main est sale, utilisez le préservatif comme un gant stérile. Il peut aussi être serré autour d’un bras pour servir de garrot voire pour tenir un bandage sur une plaie.
S’il est certain que le préservatif n’est pas pensé à la base pour ses utilisations, force est de constater que ses propriétés lui offrent une utilité bienvenue en cas d’impérieuse nécessité. Ultra extensible, résistant et imperméable, le préservatif ne prend, en outre, que très peu de place quand il est rangé dans son étui plastique. Vous pouvez retrouvez bien d’autres utilisations pratiques sur le blog tenu par Creek Stewart.
Conclusion :
Ainsi, on a pu voir que l’Armée de l’Air américaine a su produire en masse des kits de sauvetage/survie/évasion bien utiles pour ses pilotes lors de leurs missions périlleuses sur un territoire ennemi. Si l’avion était abattu en plein vol, certains pilotes parvenaient à s’en sortir en sautant en parachute. Ils pouvaient alors compter sur l’ensemble des objets introduits dans leur kit ou dans leur veste pour survivre et s’échapper.
Petits mais extrêmement bien pensés, ces kits furent donc d’une grande aide pour les pilotes américains de la seconde guerre mondiale devenus des MacGyver malgré eux.
Sources de l’anecdote
Cliquez sur ce lien pour découvrir le post Reddit qui m’a inspiré pour réaliser cet article. Pour comprendre ce choix n’hésitez pas à lire la page à propos.
Il me semble pour l anecdote qu il y avait aussi des bas nylon mais c est sans doute une legende
Haha, je n’en ai pas vu lors de mes recherches. Peut-être que les kits d’autres parties de l’Armée américaine en recevaient. A rechercher en tout cas 😉